Je suis née dans une famille d'artiste, ma mère étant danseuse et mon père peintre, il fut donc quasiment impossible que je ne m'y intéresse jamais. J'ai grandi dans l'univers qu'est l'art et toutes ses facettes. Vous savez, j'avais ce genre d'appartement new-yorkais qui ressemblait très fortement à un hangar, avec des pupitres de peintures dans tous les coins, des palettes de couleurs et même une salle de danse. Dès ma naissance j'ai baignée dedans, et je ne m'en suis jamais plains. A peine ai-je appris à marcher que ma passion pour l'art s'est tourné de suite vers la danse. Je ne cessais jamais de regarder ma mère danser, je voulais être comme elle. Dès mes trois ans, j'allais avec elle dans la petite salle et je faisais comme elle. Alors certes, les pas n'étaient pas aussi bien fait et je n'étais pas aussi souple, mais je savais qu'avec le temps ça allait arriver. Mon père lui aurait préféré que je m’intéresse à la peinture, mais en vain. Déjà avec mon frère jumeau, il avait eu l'espoir que lui s’intéresse à la peinture mais non, lui ça avait été la musique et plus précisément la guitare et la batterie. Moi, c'était la danse, uniquement la danse. Dès mes quatre ans, ma mère m'a directement inscrite dans un des meilleurs club de danse de New-York et j'ai progressé à une vitesse fulgurante. La professeur n'arrêtait pas de dire à ma mère que j'avais un talent fou pour la danse, un don. Le même que ma mère, en réalité. Le nom Ferra est un nom très connu dans le monde de la danse, parce que ma mère est une femme reconnue pour son talent et sans même le savoir, à ma naissance elle m'avait transféré son don. Comment ne pas en profiter ? Je m'éclatais, et lorsque votre fille à peine âgée de cinq ans fait des prouesses, on sait déjà quel avenir l'attend. " Ma fille, tu seras la meilleure, tu seras meilleure que moi", m'avait dit ma mère. 

A l'âge de neuf ans, mon frère et moi avons vécu  la pire chose qu'il puisse arriver à deux enfants. Nos parents ont divorcé du jour au lendemain. Alors, peut-être que les problèmes existaient depuis longtemps déjà, mais comme nous l'avait dis notre grand-mère, si ils se disputaient ce n'était jamais devant nous pour nous préserver. Or, vouloir séparer des jumeaux, même faux, ce n'est pas préserver des enfants. Nos parents avaient décrétés que je devais aller chez ma mère, et mon frère avec mon père. C'était leur arrangement, et puis tous les week-ends à tour de rôle on allaient chez notre père, ou notre mère pour pouvoir être ensemble. Mais vous imaginez, séparer deux jumeaux alors qu'ils n'ont jamais étés séparés et qu'ils ont toujours tout fait ensemble ? Ce n'est pas envisageable, et même si j'adorais ma mère et mon père, et qu'ils s'étaient installés qu'à quelques kilomètres, je ne voulais pas être sans mon frère. Et inversement. C'était une époque ou je pleurais beaucoup, parce qu'une partie de moi me manquait. Je m'endormais toute seule dans la même chambre ou avant, nous étions deux. Un week-end ou nous étions chez notre père, j'ai dis à mon frère que je voulais qu'il revienne à la maison, ou que dans tous les cas, je ne voulais plus être sans lui. Il m'a répondu que lui aussi, et que « on ne nous séparera plus jamais. ». Nous en avions parlés à nos parents, et finalement il a été conclu que nous ferions la semaine chez notre père, un week end sur deux chez notre père et pendant les vacances scolaires aussi. Autant le dire, à l'époque mes parents m'importaient peu, c'était mon frère. Je leurs en voulais d'avoir voulu nous séparer, et à partir de là la relation avec ma mère a prit un autre tournant.

On dit souvent que jusqu'à douze ans, les enfants ont une grande part d'innocence. C'est pas entièrement faux, mais c'est pas entièrement vraie non plus. A douze ans, j'étais déjà énormément mâture et après le passage de la séparation d'avec mon frère, j'en voulais toujours à mes parents mais surtout à ma mère. Pourquoi elle plus que mon père ? Je pensais avoir un lien unique avec elle, très complice et incapable de ne pas se comprendre. Pourtant lorsqu'elle a fait ça, je ne l'ai pas compris. Je n'ai pas compris son choix. Et puis, je voyais moins mon père alors, je ne pouvais pas lui en vouloir pour le peu de fois que je le voyais, je préférais profiter de lui. Ma mère et moi sommes rentrés dans une relation mère/fille très conflictuelle contrairement à ce que nous étions au début. Mon frère lui n'en voulait pas autant à ma mère, disons qu'il était un peu rancunier mais pas au même point que moi. Je ne lui adressais quasiment pas la parole, simplement par nécessité. Ce qui était pas mal dérangeant puisque nous partagions la même passion et que ma mère m'avait toujours beaucoup aidé pour la danse, mais je n'y arrivais pas. Les années passèrent et à mes 17 ans, les choses éclatèrent encore plus. Vous savez, c'est le moment ou vous devez choisir votre cursus scolaire, et vous ne devez pas vous trompé sinon vous le regrettez toute votre vie. Moi c'était clair, je voulais faire de la danse, uniquement. Autant que mon frère voulait aller au conservatoire, chose que ma mère lui à refusé, autant qu'elle m'a refusé mon entrée dans une école supérieur de danse. J'avais bossée comme une forcenée au lycée pour obtenir les meilleures notes possible, j'avais mis de côté les sorties et les garçons, je voulais lui prouver que j'en avais les capacités mais elle n'avait rien voulu savoir. Je crois que je n'ai jamais été autant énervé de toute ma vie, j'ai dis des choses que je ne pensais pas, mais je lui en voulais à nouveau. De briser mon rêve, celui de mon frère et encore une fois par le fait qu'elle ait voulu nous séparer. Mon frère et moi avons finit par aller vivre chez notre père, qui lui a tout fait pour que nous puissions entré dans nos écoles. J'ai fini par faire mon entrée dans l'école de danse la plus réputée de New-York et je me suis fais connaître pour ça... Mais je savais que tout ceci était grâce à mon père, mais aussi à ma mère. C'est donc par choix que j'ai décidé de porter les deux noms de famille "ferra-wildbury". Après ça, ma mère a voulu reprendre contact avec moi mais je n'ai pas voulu, alors j'ai continué ma vie sans lui adresser la parole pendant plusieurs années.  

A 20 ans, je m'épanouissais dans mon école de danse. En parallèle, je faisais très souvent d'autres galas avec des danseurs mondialement reconnus et mon nom ne cessait de prendre l'ampleur. Puis il a suffit d'un soir pour que tout parte en fumée. J'avais 20 ans, j'étais au summum de ma carrière de danseuse et j'ai rencontré un garçon. Le coup de foudre immédiat, il était l'homme parfait pour moi. Il acceptait ma passion et mes absences vis à vis de ça parfaitement, et pourtant il n'était pas forcément passionné d'art. Mais il le comprenait. Lorsque je n'étais pas à la danse ou avec mon frère, j'étais chez lui. Il avait un petit appartement et j'y passais tout mon temps libre, tellement que mon père riait du fait de ne plus me voir à la maison. Personne ne s'est méfié de lui, pas même mon frère qui pourtant faisait toujours attention aux garçons que je fréquentais. Notre histoire aura duré un an, j'étais plus qu'heureuse et je pensais que notre vie lui plaisait autant qu'à moi. Mais plus ça allait, moins il s'intéressait à ce que je faisais, et je pouvais le comprendre. Je lui imposais beaucoup de choses à cause de mon train de vie mais je pensais qu'il aimait ça. Puis un soir il a tout plaqué, prétextant que je ne faisais pas attention à lui, que je ne vivais que pour la danse et pour ma famille et que je n'en faisais pas assez pour notre couple. A l'heure d'aujourd'hui je ne saurai vous dire si il avait raison ou tord, mais ce que je sais c'est qu'il ne m'a pas laisser le temps de dire quoi que ce soit. Lorsqu'il ma dit tout ça et quitté par la suite, je venais d'apprendre que j'étais enceinte suite à un accident, et depuis trois mois passés. Avortement impossible. Ma carrière de danseuse était foutu, l'école m'a lâché en me traitant d'irresponsable et lui m'a laissé sans même être au courant que je portais son enfant. C'est à ce moment-là que j'ai repris contact avec ma mère, parce que je devais en parler avec quelqu'un qui serait apte à me comprendre. Mon frère lui, en voulait beaucoup trop à mon ex, mon père ne voulait absolument pas entendre parler de ma grossesse au début, il ne me restait que ma mère. Elle m'a ouvert la porte et m'a écouté.

Finalement, et après beaucoup de questions j'ai gardé l'enfant. Ce fut un garçon, que j'ai appelé Enzo et dont je suis folle. Aujourd'hui, il a un an et demi et moi, j'ai arrêter la danse. Enfin, pas complètement. Il m'est impossible de ne pas faire de danse, et je ne voyais pas mon métier en dehors de cela. Du coup, avec l'aide de ma mère nous avons fondé un club de danse en plein cœur de New-York, et nous donnons toutes les deux des cours pour des jeunes filles de 7 à 13 ans. J'adore mon métier, réellement. Je vis désormais dans un petit appartement moderne à New York avec mon fils, et je m'en sors avec l'aide de mes parents et de mon frère. Je n'ai pas perdu mon caractère difficile, je ne me laisse toujours pas faire mais je sais ce que je veux et ce que je ne veux pas.