« Je suis pas une fille facile, je profite juste, compte pas sur moi pour suivre ton exemple ! » Se défendit la demoiselle alors que sa mère lui reprochait de nouveau de ramener trop d’hommes à la maison. Il faut dire que ce n’était encore qu’une enfant, le bébé à sa maman alors, c’était difficile à accepter. Pourtant, Enora ne voyait pas les choses de la même façon. Elle voulait profiter de la vie, ne rien regretter, vivre sa jeunesse à fond et non reproduire les erreurs de sa mère qui s’était mariée beaucoup trop tôt. Elle avait raté sa vie, elle s’était mariée au mauvais homme, avait eu deux magnifiques enfants, les avait choyé telle une mère parfaite et avait réussir à en oublier son couple en se créant une carapace indestructible. Enora ne voulait pas être comme sa mère, elle voulait être son opposé, elle voulait réussir à s’affirmer et contre ça, madame Jarkov n’avait pas beaucoup de pouvoir. « Puisque c’est comme ça, tu es punie de sorties jusqu’à nouvel ordre ! » La petite brune fronça les sourcils, essayant de suivre ce que je raconte sa chère mère. Finalement, elle lui ria au nez et si cela était tout bonnement une forme de provocation, maman n’osait jamais rien lui dire face à son fort caractère. « J’ai une fête de soir d’ailleurs, je dois aider Jazmine à la préparer du coup, tu peux toujours courir. De toute façon, ça sert à rien de réagir comme ça, tu sais parfaitement que je ferais le mur. Arrêtes de jouer la maman dure et responsable, ça a l’effet d’une grosse blague… » Jazmine. Sa mère ne l'aimait pas tellement cette petite, elle avait soi-disant mauvaise influence sur Enora, comme si elle avait besoin d'être influencée ! Elle soupira désespérément et avant que sa mère eut prononcé son premier mot, le frère fit son entrée dans la cuisine et après avoir déposé un baiser sur la joue de sa mère, il rejoignit sa petite sœur et la prit par les épaules pour l’entraîner dehors. Direction le collège. Il était son grand frère d’amour, son modèle et elle, sa petite protégée, sa princesse. Il tenait à elle comme à la prunelle de ses yeux alors bien entendu, il se rangeait toujours de son côté, même quand elle avait tort et cédait à ses moindres caprices. « T’y as été un peu fort sur ce coup Eno’. » Elle roula des yeux avant de plonger ces derniers dans le regard de son frère. Elle lui adressa un léger sourire par politesse puis, reporta son attention sur l’horizon. « Arrête de la défense, elle n’a jamais rien fait pour nous. Elle a que ce qu’elle mérite ! ».

Elle lui en voulait à sa maman. Elle la tenait responsable de tous ses malheurs. Elle avait fait fuir son père, l’avait confié, elle et son cher frère, à tout un tas de nourrices incompétentes. Elle n’avait rien fait pour son bonheur alors aujourd’hui, elle lui faisait payer le fait d’être une mauvaise mère. Enora adorait lui reprocher tout un tas de trucs pourtant, du jour au lendemain, tout s’arrêta. Elle dut quitter la maison familiale car le nouveau copain de madame n’appréciait pas sa façon de parler et de se comporter. De toute façon, elle serait partie dans tous les cas, comme son frère quelques semaines auparavant. Trouvant refuge dans un grand appartement de Manhattan avec ses amis, elle les considéra rapidement comme une seconde famille, une vraie famille, des gens qu’elle appréciait bien plus que tout. « Enora, j’espère que tu te fous de ma gueule, je vais être en retard en cours ! » Il toquait à la porte de la salle de bain comme un cinglé, lui demandant d’ouvrir or, il dut reformuler sa demande à deux reprises pour que mademoiselle cesse de chantonner et baisse la radio. « Trésor, je suis en train de prendre ma douche alors à moins que tu souhaites me rejoindre, je te conseille d’attendre. » Elle était comme ça Enora, toujours d’humeur taquine et souriante et ce, dès le matin… On ne peut pas dire qu’ils étaient tous sur la même longtemps d’ondes à la coloc’. « Ouvre cette porte ou je la défonce ! » Il eut à peine fini sa phrase qu’Enora avait entouré une serviette autour de son corps pour lui ouvrir la porte et lui céder sa place. « Rabat-joie ! » Bougonna-t-elle le sourire aux lèvres en passant à côté de lui pour rejoindre sa chambre comme si de rien était. Elle savait qu’il aurait été capable de le faire, il l’avait déjà fait par le passé et, à plusieurs reprises. Par conséquent, elle finissait, aujourd’hui toujours par lui obéir et c’était sans doute le seul qui arrivait à la mener à la baguette. Il fallait bien que quelqu’un arrive à la canaliser cette petite chose, faut croire que les garçons avaient trouvé le truc.

La musique à fond comme chaque matin, Enora s’était levée avec le smile et elle dansait dans les couloirs de l’appartement, consciente que la musique, ainsi que ses pas, allaient réveiller les voisins qui allaient, une nouvelle fois, se plaindre du bruit. Pas grave, ce n’était pas le plus important. Arrivée à la cuisine, elle découvrit l’un de ses colocataires en train de cuisiner et là, ce fut le choc. « Non sérieusement, depuis quand tu fais le p’tit déj ? » Le questionna-t-elle curieusement tout en s’emparant d’un cookie. Du moins, elle essaya car ce dernier lui tapa sur la main pour qu’elle le relâche, ce qu’elle fit sans broncher, levant les bras d’un air innocent. « C’est l’anniversaire de ma copine aujourd’hui. » Enora essaya de déceler le vrai du faux. Est-ce qu’il était encore avec cette cruche ? Est-ce que c’était une blague pour la faire rire ? Non, apparemment, c’était bel et bien sérieux. Elle soupira d’un air désolé pour lui. « Bah putain, ça te réussit pas d’être amoureux. On peut lui organiser une soirée ou tu préfères un resto aux chandelles ? » Les filles avaient beau ne pas s’aimer, les soirées, c’était la spécialité d’Enora et elle comptait bien donner un coup de main à son ami s’il acceptait son aide. Celui-ci sembla gêné, il se tournait vers elle en grimaçant. « A vrai dire, ça serait cool si tu pouvais me laisser l’appart ce soir. Je comptais faire un dîner aux chandelles en amoureux. » Trop romantique pour Enora qui avait envie de vomir. Pourtant, elle devait s’y attendre. Elle savait parfaitement qu’il était fidèle, la tête sur les épaules, un peu le papa ici et donc, elle allait devoir se trouver une occupation pour cette nuit. « Ok, tu me vires, j’ai compris ! Je serais pas là ce soir t’inquiètes pas, je vais pas vous déranger. » Elle croisa les bras, déçue par son comportement mais, piqua tout de même un cookie avant de se mettre à courir. Il fit quelques pas or, finit par la laisser partir. Elle entra dans la chambre du petit dernier, sans prendre la peine de frapper, bien que celui-ci soit accompagné d’une jolie blonde, complètement perdue à l’heure actuelle. « C’est qui celle-ci ? » Enora eut droit à un relooking de la tête aux pieds mais, elle restait de marbre et, calme contre toute attente, ce qui fit rire le jeune homme qui passa une main dans ses cheveux l’air de rien. « Je suis sa petite amie maintenant, casses-toi avant que j’te refasse le portait ! » La blondasse se leva d’un bond, se rhabillant en quatrième vitesse tout en insultant le jeune homme du début à la fin. Enora attendit qu’elle quitte la pièce, claquant la porte derrière elle pour rejoindre celui qu’elle considérait comme son frère. Elle déposa un baiser sur sa joue et se blottit dans ses bras. Il passa un bras autour de ses épaules et déclara : « Tu sais, un jour, tu vas faire fuir la bonne et ce jour-là, je ne suis pas sûr d’être capable de te le pardonner. » Elle leva les yeux en sa direction, un sourire amusé collé sur son visage d’ange. « Je suis la femme de ta vie, je suis la bonne. T’as besoin de personne d’autre. » Bien entendu, c’était de l’humour. Ils avaient déjà couché ensemble pour le fun or, il ne se passerait jamais rien de plus entre eux. Ils étaient amis et, c’était très bien comme ça.

Ça aurait pu être une soirée comme les autres. L’alcool, la musique, les gens, les mecs sexy, la drogue qui tournait par ici et par là. Enora, elle ne touchait pas à ça, elle se contentait de boire et c’était nettement suffisant. Après plusieurs verres, l’alcool coulait dans ses veines aussi facilement que son sang et les boom boom dus à la sono commençaient à lui donner mal au crâne. Par conséquent, la demoiselle décida de quitter la petite fête, seule pour une fois. Elle prit le volant et, je vous laisse imaginer la suite… La voiture n’eut rien, elle, elle avait récolté quelques égratignures or, rien de bien méchant contrairement au pauvre piéton qui se trouvait allongé au beau milieu de la route. Paniquée, les larmes aux yeux, en état de choc, elle n’eut d’autre choix que de prendre la fuite après avoir averti les secours. Elle se mit à rouler encore et encore et finit par rater la maison de son grand frère, se retrouvant devant la porte du meilleur ami de ce dernier. Elle se mit à frapper, comme si sa vie en dépendait et lorsqu’il ouvrit la porte, il semblait on ne peut plus étonner de la voir ici. Il passa sa main derrière sa nuque, gêné et de la voir sur son palier à une heure pareille, dans cet état. « Enora ? Mais qu’est-ce que tu fais là ? » Elle se contenta de se jeter dans ses bras en guise de réponse, pleurant toutes les larmes de son corps. Il l’invita bien évidemment à rentrer, à se confier or, rien ne sortit de sa bouche, pas même un mot. Elle resta ici plusieurs jours, essayant de passer au-dessus de ses cauchemars qu’elle faisait nuit après nuit. Il ne fermait plus l’œil, était exténué même s’il prétendait le contraire. Cette nuit ne fut pas une exception. Elle se mit à hurler des choses incompréhensibles et comme toujours, il accourut pour lui venir en aide, pour la calmer. « Ca va aller, je suis là… Je suis là… » Elle se débattait jusqu’à n’avoir plus assez de force, essaya de reprendre sa respiration en reposant la tête contre son oreiller tandis qu’il séchait ses larmes d’un revers de la main. « Reste avec moi s’il te plaît… Je veux pas dormir toute seule. S’il te plaît, reste… » Elle lui tenait la main aussi fort que possible et n’était pas décidée à la lâcher. Habituellement, elle n’avait pas besoin de supplier un homme de rester dans son lit de cette façon bien au contraire, c’était plutôt son genre de refuser des invitations lorsqu’elle souhaitait être seule et qu’elle n’était pas intéressée. Cette nuit, elle avait besoin de lui, de lui uniquement. Il vint donc s’installer à ses côtés et resta toute la nuit éveillé par peur que ses cauchemars reviennent au galop. Une enfant. Voilà ce qu'elle était dans le fond, une enfant perdue.

Après une semaine passée chez le meilleur ami de son frère, Enora se décida à rentrer à la colocation. Elle ne pouvait pas rester chez lui toute sa vie, l’obliger à lui laisser son lit. Non, il était grand temps qu’elle se montre forte, qu’elle assume et ce, même si elle pouvait se retrouver en prison du jour au lendemain si cette histoire faisait surface. « Bah alors, t’étais où petite tête ? » Elle referma la porte derrière elle, balança son sac dans l’entrée comme si de rien était. « Tu nous as manqué putain ! » Elle retira ses chaussures et replaça ses cheveux, le sourire aux lèvres. Et de deux, il n’en manquait plus qu’un. « Tu sais que j’ai dû donner mon numéro de téléphone à plusieurs filles pour qu’elles me fassent l’honneur de quitter ma chambre ? Damn, c’est ton taff ça normalement ! » Enora les regardait tour à tour, un large sourire sur les lèvres, les yeux tout pétillants, super contente de retrouver ses meilleurs amis. « Vous aussi vous m’avez manqué mes amours ! Câlin collectif ! » Elle les prit dans ses bras et les serra fort, bien que certains émettaient des objections. Finalement, elle se retira et, voyant tous les regards interrogateurs en sa direction, finit par en conclure qu’il lui fallait obligatoirement un alibi. « J’ai rencontré un mec, j’ai passé une semaine torride avec lui mais maintenant, c’est fini, je suis à vous ! » Elle leur fit un clin d’œil, s’installant dans le canapé avant de sortir ses bouquins et des feuilles pour se mettre à travailler. « Heureusement que tu l’as pas ramené ici, j’imagine même pas le bordel. J’aurais dû choisir la chambre la plus loin de la tienne. » Rigola le petit dernier –comme elle le disait si bien. Elle lui tira la langue avant de lui lancer un coussin en pleine face, ce après quoi elle reprit son sérieux pour se mettre au boulot. Enora avait beau être une fille qui aimait faire la fête et s’amuser, elle savait également être sérieuse dans ses études qui la passionnaient et la faisaient vivre. Lorsqu’elle travaillait sur un défilé, un anniversaire, sur l’organisation de tel ou tel événement ou encore, sur un cours théorique, elle se retrouvait dans sa petite bulle et rien ne personne ne pouvait la déranger, oh ça non !